Annulation d'un mariage : la femme n'était pas vierge
Refus d'accorder la nationalité : la femme portait la burqa

Quel jugement est le plus choquant ?

Religion et citoyenneté, sphère publique et sphère privée, ces jugements posent des questions centrales et apportent des réponses contradictoires, du moins en apparence.

Dans son arrêt du 27 juin 2008 refusant pour « défaut d'assimilation » la demande de nationalité d'une marocaine, épouse d'un français depuis cinq ans et mère de trois enfants français, le Conseil d'État met en avant le fait que la demanderesse « a adopté une pratique radicale de la religion incompatible avec les valeurs essentielles de la communauté française et notamment avec le principe de l'égalité des sexes ».

Elle s'est présentée « recouverte des vêtements des femmes de la péninsule arabique, (...) ne laissant voir les yeux que par une fente, (...) elle n'a aucune idée sur la laïcité ou le droit de vote (...) elle vit dans une soumission totale aux hommes de sa famille (...) l'idée de contester cette soumission ne l'effleure même pas ».


Certains s'insurgent au nom de la liberté de pratiquer la religion de son choix ; ils oublient au passage que la liberté de chacun s'arrête ou commence celle des autres et que nos libertés sont moins la résultante de nos pulsions individuelles que des lois démocratiques qui en garantissent l'exercice et en encadrent la jouissance.

Car, viol manifeste du principe d'égalité, la burqa – une prison, une camisole - est aussi l'expression provocatrice d'un projet politique de type totalitaire – la charria - évidemment contraire à toute idée de démocratie. Et si la burqa est le signe évident de l'oppression, le voile est bien quant à lui le symbole de la soumission et vient heurter, certes à un degré moindre, les mêmes principes d'égalité homme-femme et de démocratie.

Car c'est bien dans la sphère publique, dans la rue, dans les relations avec l'administration, avec les services hospitaliers et non dans la sphère privée que les tenants de la « liberté religieuse » entendent imposer leur vue.

C'est donc à bon droit, se situant en cela dans la continuité de la loi de 2004 (que j'ai votée) sur l'interdiction des signes religieux à l'école, que le Conseil d'État a refusé d 'accorder la nationalité française.

En effet la France, par son histoire, par ses valeurs, par ses principes universalistes fondateurs de sa République et de sa Démocratie, se distingue tant du multi-culturalisme britannique que du communautarisme américain. La communauté française n'est fondée ni sur la race, ni sur la religion, mais bien sur l'adhésion à ses valeurs qui ne sont autres que les règles du « vouloir vivre ensemble ».


Plus choquant me semble, pour ces raisons, le jugement accordant le divorce à un homme pour défaut de virginité de son épouse. Je comprends l'argument juridique : le consentement s'est fait sur des bases erronées. C'est un fait. Et la virginité de l'épouse était certainement une donnée essentielle du consentement.

Mais on voit bien que l'inverse – l'exigence par l'épouse de la virginité de l'époux – n'est même pas évoqué, et que sa preuve serait d'ailleurs impossible. Et c'est en quoi ce jugement est inacceptable : pour les raisons évoquées plus haut, il va à l'encontre de ces mêmes principes fondamentaux de l'égalité des sexes et de démocratie.

Je suis heureux que le ministère public, après les hésitations du garde des sceaux Madame Rachida Dati, s'en soit souvenu et ait interjeté appel contre ce jugement qui porte en lui les germes d'une dérive communautariste et anti-démocratique.